Pour sa troisième édition, VinEquip donne rendez-vous à 3607 professionnels de la filière viti-vinicole du 26 au 28 mars 2024, à Mâcon en Bourgogne. Retour sur quelques points forts de cette édition : un concours concernant la flavescence dorée, et le point sur le gel de printemps, au cours d’une conférence.
« Autant aller au plus près de la maison ! », entend-on de la part de vignerons bourguignons visiteurs au VinEquip, satisfaits d’avoir la possibilité d’un salon « à domicile ». Si la viticulture biologique n’est pas mise en avant, en soi, sur l’évènement, de nombreuses thématiques, fondamentales pour les bio sont abordées. Pour sa troisième édition, VinEquip expérimente le partenariat avec Agronov, le pôle d’innovation en agroécologie de Bourgogne Franche-Comté. Ainsi, l’espace Vigne et Climat rassemble des exposants offrant des solutions novatrices pour la pérennité de la viticulture.
Hackathon flavescence project
Grande première de l’édition 2024, le Hackathon flavescence projet, est un concours pour avancer dans la lutte contre la flavescence dorée. Durant le salon, une quinzaine de participants volontaires, experts, entrepreneurs, universitaires, forment quatre équipes pluridisciplinaires. Les membres de chacune d’entre elles, collaborent pendant 48 heures pour créer des prototypes novateurs, utiles dans la gestion de la maladie. « Les projets doivent répondre à au moins un de ces quatre objectifs : améliorer la reconnaissance des ceps atteints, leur géolocalisation, le transfert des données aux autorités compétentes et le transfert et l’accès de ces données aux vignerons », présente Nicolas Dorison, de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire et animateur du Hackathon. Pour les aider, un fablab est à disposition des équipes, avec deux imprimantes 3D, une découpe laser, une vigne artificielle. « Les projets sont évalués sur leur innovation et originalité, leur faisabilité technique, la qualité de démonstration, la viabilité financière, l’exécution rapide et un effet « coup de cœur » » . Le jury, composé de la Fredon Bourgogne Franche-Comté, le CAVB (Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne), le BIVB (interprofession), l’ODG des Crus du Beaujolais et le Sral Bourgogne Franche-Comté, choisit parmi les projets le plus pertinent.
Cartographier les pieds atteints
Le dernier jour de VinEquip, Yves Seguy, Préfet de Saône-et-Loire, Benjamin Dirx, député de la 1re circonscription de Saône-et-Loire, Jean Patrick Courtois, Maire de Mâcon, et David Luche, de GL events, responsable de VinEquip récompensent l’équipe lauréate : il s’agit de celle portée par la société Agaric-IG, proposant un Hub central, une plateforme sur laquelle on peut retrouver l’ensemble des données d’observation, de résultats d’analyse, et de prospection de différents acteurs. La société propose ensuite un rendu sous forme de cartographie, mettant en exergue les localisations de pieds atteints de jaunisse. « Ces lauréats seront accompagnés par la Préfecture de Saône et Loire pour monter un projet de candidature, dans le cadre de leur plateforme d’accélération des projets, afin d’obtenir un financement via France 2030 et/ou un autre dispositif d’aides publiques », détaille Benjamin Alban, chef de service vigne et vin de la chambre d’agriculture de Saône et Loire et expert mobilisé pour ce concours. Les autres équipes, portaient les projets suivants : un outil pour aider à repérer la maladie avec Vinivox (voir article « 300 exposants à VinEquip - Des nouveautés et des améliorations pour la filière ») ; une méthode pour identifier la flavescence dorée en moins de deux heures avec le laboratoire Leafy et un service de location de robots pour l’inspection et la prévention de la flavescence dorée à la vigne avec Gemma-bot.
Le gel de printemps, aléa aléatoire
Une des 15 conférences de VinEquip fait le point sur le gel de printemps, menace annuelle pour la plupart des vignobles français. Thomas Gouroux, conseiller viticole à la chambre d’agriculture de Côte d’or, estime important de rappeler d’abord les deux types de gel possibles : le gel advectif, dû à l’arrivée d’une grande masse d’air froid polaire, avec lequel la température est négative sur plusieurs dizaines de mètres de haut, et le gel radiatif, causé par les ciels dégagés, induisant une perte de chaleur du sol vers l’atmosphère. « En 2021, nous avons eu les deux types de gel, rendant la protection compliquée. Et sans oublier qu’à certaines températures, comme -9°C, il devient très dur d’avoir des solutions efficaces. » Le conseiller avoue ne pas pouvoir nommer un équipement plus performant qu’un autre : « la solution universelle n’existe pas, chaque domaine n’ayant pas les mêmes contraintes technico-économiques. Et cela dépend aussi du type de gel, et des conditions météo. Par exemple, une tour anti-gel n’est pas le meilleur moyen si le gel est advectif, et idem si la vitesse du vent dépasse 16 km/h. » Associer plusieurs techniques pour se protéger semble indispensable. Mais les décisions sur les investissements à réaliser sont complexes, car le type de gel et les conditions météo ne sont pas connus au moment de l’achat. « Combiner aussi les solutions techniques, avec de la lutte passive comme la taille tardive, est un plus. Mais cela ne résout pas tout non plus. Car on obtient au maximum entre 2 à 10 jours de décalage de débourrement. »
Utiliser l’infra-rouge
Dans les solutions de protection en cours, la société Frolight, présente un système de production de chaleur par radiation avec la technique infrarouge, via un câble attaché sur le fil de palissage. « Cela induit très peu de déperdition , indique Marcel Angel, responsable commercial France de la société. La source de chaud reste collée à la vigne, même avec un vent de 6 km/h, de la pluie ou quel que soit le type de gel. » Cette chaleur rayonnante est constituée d’ondes électromagnétiques qui transfèrent l’énergie de façon très efficace. Des unités de contrôles, comportant au maximum 1 200 mètres de tubes de lumière infrarouge, sont connectées à un générateur ou au réseau électrique. Les tubes sont disponibles en longueur de 25, 50, 75, 100, 125 ou 150 mètres.
Prioriser les parcelles et peaufiner les risques
Face aux investissements et au temps de main-d’œuvre, il est évident que les protections contre le gel sont à prioriser en fonction des parcelles : celles avec davantage de plus-value et aux cépages les plus précoces sont en général visées en premier. « Faire aussi la balance entre les dégâts encourus et les investissements nécessaires, se demander si son domaine est réellement impacté par le gel, ou seulement de façon occasionnelle ? » Pour Thomas Gouroux, la priorité est de bénéficier de modèles météo encore plus fiables et précis. Et avoir des cartes de prévision des zones les plus gélives est un atout. C’est ce que propose Marc Ouvrié de Vineis projets, qui travaille sur une méthodologie établissant des cartes de potentialités et de risques climatiques. Et ce, à l’échelle d’une parcelle, d’un domaine, voire d’une appellation. « Il s’agit de récupérer, pour une zone donnée, des éléments liés au climat : température, hygrométrie, direction du vent, exposition au rayonnement solaire, explique Marc Ouvrié. Nous pouvons ensuite établir des zonages climatiques indiquant les lieux avec risques de gel et de fortes chaleurs. » Enfin, pour Thomas Gouroux, la question se pose aussi de revoir les modes de conduite de la vigne : il pointe notamment les limites, dans certains cas, des vignes basses et étroites. « Mais ce sont des changements profonds, pas toujours faciles à enclencher avec les appellations. »
Frédérique Rose
À noter : Prochain rendez-vous pour VinEquip, du 1er au 3 avril 2025.