Une édition 2024 à la hauteur des enjeux
Les points de vigilance de la filière viticole bio ne sont pas ignorés, au contraire. « Oui, nous le répétons, le défi majeur est de trouver les débouchés pour ces volumes bio maintenant disponibles », indique la jeune vigneronne. C’est dans cette optique notamment que le coin dédié au vrac sur le salon est une première. « Les visiteurs ne peuvent se rendre partout. Nous leur proposons ainsi dans un seul espace un aperçu des volumes disponibles en Occitanie, avec la possibilité de déguster. Il y a un besoin, à voir avec le recul si les visiteurs ont saisi cet outil. »Accélérer la com !
Autre enjeu, former, éduquer, informer le consommateur pour relancer la consommation. « Il ne sert à rien de se fixer des objectifs de production bio si nous ne nous sommes pas donné des objectifs de consommation bio ! », insiste Laure Verdeau, directrice de l’Agence Bio, martelant encore et encore : « Il est indispensable de faire reconnaître la bio comme le diplôme d’État des engagements environnementaux, ce n’est pas une démarche privée ! De démontrer qu’un vin nature ou végan n’a pas de sens s’il est produit à base de raisin ayant reçu des produits phytos de synthèse ! Et surtout de lever les freins auprès des chefs des restaurants. » Millésime bio poursuit cette volonté avec la mise en ligne du site levinbio.fr, pour rendre visible et de façon assez simple les éléments d’explication et de présentation clés relatifs au vin bio. « La Fête du vin bio, organisée pour la première fois en parallèle du salon auprès des commerçants et restaurateurs de Montpellier poursuit le même but : mettre en lumière le vin bio et aider les professionnels à capter de nouveaux clients. Nous attendons impatiemment les retours de cette expérience. » Pour Jeanne Fabre, l’important également est de se réapproprier le discours du « mieux-disant » : « Nous devons évoquer davantage des démarches des vignerons. Lorsqu’ils en parlent c’est magnifique ! La bio n’est pas juste une liste d’actions interdites ! »Atteindre les paliers
La présidente de Millésime Bio rappelle que la filière vin bio s’est structurée depuis 30 ans, afin de gérer elle-même sa mise en marché. « Nous restons bien organisés. » Et dans ce contexte global de baisse des ventes de vins, la filière vin bio continue néanmoins de recruter des consommateurs. « Il faut arrêter de dire que le vin bio ne se vend pas ! Et dans la majorité des cas, le cours du vin bio reste rémunérateur. Nous sommes à un palier, il y en a toujours eu. Nous reviendrons à une croissance normale. Mais nous ne fanfaronnons pas non plus en disant que tout va bien ! » Laure Verdeau, présente notamment les premières estimations du 1er semestre 2023 de la consommation de vins bio : les ventes continuent de baisser en GMS (-7,6 % en volume et -4,8 % en valeur), les magasins bio affichent aussi une baisse de -4,5 % due aux fermetures des magasins. En revanche la vente directe est à +2 % et les cavistes à +1 %. « Mais nous aurons l’ensemble des chiffres le 13 juin. »Attention aux prix
Jeanne Fabre fait part de sa vigilance sur le prix payé aux vignerons bio, la rémunération étant primordiale. « Nous avons besoin des acteurs économiques rendant le vin bio accessible, ils sont complémentaires aux autres circuits, mais ils ne doivent pas structurer le marché. » Pour l’administratrice de Sudvinbio, l’interprofession est une organisation clé pour conseiller les vignerons. « Aucune industrie ne vend ses produits avant d’aller voir s’il y a un marché. C’est essentiel d’identifier ses cibles et adapter sa production en fonction des attentes. Sur notre domaine, au-delà de nos rouges classiques, nous développons par exemple des vins de chardonnay et des rosés, qui sont très appréciés ! »Au cœur de la crise agricole
Interrogée sur les mouvements, durs, qui traversent l’agriculture ces jours-ci, Jeanne Fabre est très claire : « Ce sont des heures graves en France. La colère des agriculteurs s’enracine sur ce scandale de la mauvaise rémunération d’un travail pourtant très conséquent. Nous nous retrouvons dans ce constat. » Pour la vigneronne, demander toujours plus de qualité à des prix toujours plus bas est inconcevable. « Et tout le monde souffre de ces empilements administratifs. De vraies mesures doivent être prises avant que la situation ne se tende trop. Mais cela ne veut pas dire d’être moins exigeant vis-à-vis de l’environnement ! Les normes ne sont pas liées uniquement à des exigences environnementales ! Nous les retrouvons à tous les niveaux de notre production ! »Frédérique Rose