Parcours en muscadet – 1er épisode d'un parcours en muscadet

Le 02/07/2020 à 17:19

Vitisbio suit un vigneron chaque année. Chaque quinzaine, nous prendrons connaissance de son actualité, ses enjeux techniques, ses difficultés et ses réussites !

Pour cette première, faisons la connaissance de Robin Euvrard : ce jeune agronome, non issu du milieu agricole, se lance sur une parcelle en muscadet. Son témoignage illustre comment des jeunes sans foncier, ni historique viticole, trouvent des opportunités et s’organisent pour réaliser leur projet : devenir vigneron bio.

Vitisbio : Robin Euvrard, pourquoi devenir vigneron ?

Robin Euvrard   : Je ne semblais pas prédestiné à devenir vigneron. Je suis né et j’ai grandi en région parisienne, sans lien aucun avec le monde agricole. J’ai suivi des études d’agronomie à Rennes, avant de travailler au groupement des agriculteurs bio du Nord-Pas-de-Calais pendant six années. Et ce, avec un défi ambitieux : développer la bio en grandes cultures. J’y ai exploré toutes les facettes du métier de conseiller agricole : suivi technique, expérimentation, projets de recherche, formations, journées techniques... Malgré ces « handicaps » géographiques de départ, j’ai découvert le vin et je me suis pris de passion pour la vigne et sa culture. La rencontre fut si intense que j’ai quitté les plaines céréalières du Nord, armé d’une revendication forte : je serai vigneron. Je me suis alors lancé dans un tour de France sur-mesure, pour découvrir, apprendre et rendre possible ce projet.

Comment vous êtes-vous formé à la conduite de la vigne en bio ?

Avec mon expérience de conseiller bio, je partais avec quelques bases scientifiques et techniques éprouvées sur le sol, le végétal… Mais pour devenir vigneron, il me fallait apprendre la vigne, comprendre les gestes du métier, les répéter pour les faire miens. Plutôt qu’une formation, je suis devenu salarié viticole pendant quatre années et j’ai eu la chance de travailler auprès de vigneronnes et vignerons chevronnés et passionnés. J’y ai formulé plus d’une fois la question magique : «  pourquoi tu fais ça comme ça  ? ». Et ce qui était un rêve lointain s’est mué en une passion dévorante. J’ai appris à manier le sécateur et la pioche et à accompagner la vigne au fil des saisons. J’ai planté, taillé, biné, ébourgeonné, palissé, vendangé, soutiré, assemblé et mis en bouteille. J’ai tenté d’apprivoiser le rythme de cette vie et de ce métier si particulier, de me l’approprier pour mûrir mon propre projet.

Dans quelles régions viticoles avez-vous travaillé ?

Rendre possible ce projet, c’était aussi trouver mon point de chute, le terreau favorable. N’ayant baigné dans aucune tradition familiale, j’ai pu me laisser guider par mes goûts et par les rencontres. J’ai parcouru le Val de Loire et l’Alsace, avant de me poser pour une campagne en Ardèche, pour quelques mois à Cahors puis pour deux années complètes à Gaillac. J’y ai fait aussi mes premiers essais de vinification, avec une micro-cuvée de malbec cadurcien en 2017, puis une expérience grandeur nature à Gaillac en 2019 sur une parcelle prêtée par un vigneron. C’est finalement à Nantes que j’ai fini par atterrir, en plein cœur du Muscadet. J’y suis arrivé avec passion et avec l’envie de participer à la dynamique portée par quelques vignerons pionniers.

Quand avez-vous posé vos valises dans le Muscadet ?

Je me suis installé après les vinifications de 2019, en novembre. J’ai rencontré l’équipe Ecodyn au détour d’une journée technique. Ils venaient de racheter une parcelle de vigne. Nous avons échangé sur nos projets, nos idées et nos envies, et elles ont paru converger. Alors sans prendre le temps de tout écrire à l’avance, on s’est lancé.

Robin Euvrard commence son activité avec une parcelle, principalement de melon de Bourgogne, au sud de Loroux-Bottereau, en Loire-Atlantique. (© R. Euvrard)

 

Pouvez-vous présenter les vignes ?

Il s’agit d’un hectare de melon de Bourgogne, d’une vingtaine d’ares de folle-blanche et quelques ares de gamay, au sud du Loroux-Bottereau. Le tout est rassemblé sur une parcelle au lieu-dit du « Clos du Pont Marmite », un endroit magique sur la route des Moulins. C’est une petite surface pour initier le mouvement et rêver à plus grand, lorsque les opportunités se présenteront pour construire progressivement un domaine cohérent de quelques hectares. L’aventure démarre sur ce petit parcellaire de vignes, mais tout reste à construire : dimensionner et trouver le matériel adéquat, équiper un chai de vinification car je souhaite produire et vendre le vin, apprivoiser les cépages et mettre en place les techniques participant à l’agriculture de demain pour des vignes saines et vivantes dans un écosystème préservé le mieux possible. Les vignes, entrant en conversion en juillet 2020, vont être certifiées bio et Demeter, mais l’objectif est de développer d’autres pratiques favorisant le vivant : implantation de couverts végétaux annuels et pluriannuels, emploi de thés de compost oxygénés et de macérations de plantes, pratiques de taille douce, réimplantation d’arbres… Et avec l’ambition discrète d’essayer de faire beau et de faire bon.