Couverts végétaux en conditions méditerranéennes : détruire avec le bon outil, à la bonne date !

Le 18/07/2024 à 14:00

Grâce à une expérimentation de trois ans, le Civam bio de l’Aude (Biocivam 11) confirme l’impact, sur la vigueur de la vigne et l’état hydrique du sol, d’une destruction d’un couvert végétal par roulage. Une journée sur le terrain le 11 juillet, avec Célesta-Lab, met en avant les résultats.

De 2021 à 2024, le Biocivam 11 expérimente, chez deux vignerons, différents modes de destruction de couverts végétaux. Un témoin, où l’inter-rang est travaillé pendant la saison, est comparé à une modalité avec roulage précoce ou tardif et à une modalité avec destruction et enfouissement du couvert via des disques ou des pointes, et ce, idem, de façon précoce ou tardive. « Il y a toujours eu un mois d’écart entre les modalités précoces et tardives, en général entre fin mars et fin avril » , détaillent Anaïs Berneau, conseillère viticole au Biocivam 11 et Sarah Martin, stagiaire en charge des expérimentations. L’association organise, le 11 juillet, une journée chez Joan Fournil du domaine Fontanille Haut et Benjamin Darnault du Château Maris, les deux vignerons ayant participé à l’essai. En partenariat avec Thibaut Déplanche, directeur général de Célesta-Lab, l’objectif de la journée est d’observer des fosses pédologiques sous chaque modalité (1). En préambule, les résultats des expérimentations sur le sol et la vigne sont mis en avant.

Thibaut Déplanche à gauche, Joan Fournil (2e à gauche) et Benjamin Darnault à droite.

Contrainte hydrique moins forte sur témoin et disques

Des relevés de sondes tensiométriques, une fois par semaine de novembre à juillet, révèlent que la contrainte hydrique des sols est moins forte pour les modalités témoin et disques précoces. « Pour ces modalités, nous notons aussi une meilleure absorption de l’eau et une humidité des sols globalement plus élevée. » En outre, le témoin semble peu impacté par les épisodes pluvieux, avec une variation faible de la tensiométrie. « Mais la réhumidification du sol est meilleure pour les modalités disques tardifs et roulage, en cas de pluie. » Concernant la température du sol, elle est plus élevée en surface pour la modalité témoin.

Impact du roulage sur la vigueur

Deux fois par mois en juin et juillet, le Biocivam 11 suit les arrêts de croissance de la vigne (méthode des apex) et évalue les surfaces foliaires (méthode SECV). « Nous remarquons des volumes foliaires plus élevés pour les modalités témoins et disques précoces, et davantage d’arrêts de croissance avec le roulage tardif. » Les roulages induisent aussi des floraisons plus tardives comparées aux autres modalités. « Et au bout de trois années d’essais, les différences de vigueur sont de plus en plus marquées. Nous avions une troisième parcelle d’essai. Mais le vigneron a arrêté les essais au bout de deux ans, car les impacts du roulage sur sa vigne étaient trop importants. Pourtant c’était la seule parcelle irriguée du dispositif. » Concernant la vendange (l’objectif de rendement sur les deux parcelles étant de 30 à 40 hL/ha), l’association note une concentration en sucre, un pH plus élevé et un meilleur rendement pour le témoin et les disques précoces.

Différences de vigueur entre la modalité rouleau précoce à gauche et le témoin à droite, sur la parcelle de Benjamin Darnault.

Difficulté du roulage en climat méditerranéen

Conclusion de l’essai, pour les conditions méditerranéennes, le choix de l’outil de destruction est déterminant. « C’est surtout ça qui compte, plus que la date de destruction , notent Anaïs Berneau et Sarah Martin. Sachant que les écarts de résultats sont faibles pour une destruction avec disques en précoce ou en tardif . » L’association observe d’ailleurs chaque année un doublement de la biomasse produite entre les modalités de destruction précoces et tardives. « Et nous savons que davantage de biomasse est toujours positif, à long terme, pour la vie et la fertilité du sol. L’enjeu est de réussir à garder son couvert le plus longtemps possible, sans impacter trop la vigne. Il faut trouver le bon compromis. » Anaïs Berneau, pointe la difficulté de la destruction avec le roulage. « Pour réussir le roulage, il faut avoir les bonnes espèces, adaptées à ce mode de destruction et pouvoir passer au bon moment : en général en post floraison, pour réussir à bien coucher les plantes, rappelle la conseillère . Or pour une majorité d’espèces, cela se situe en avril-mai. C’est déjà trop tard pour nos conditions séchantes. Même en semant tôt, nous n’arrivons pas à avoir le bon créneau. » Le roulage s’effectue donc souvent trop tôt, et n’est jamais totalement détruit. « L’évaporation des feuilles et la poussée racinaire continuent. Ce qui est préjudiciable pour la vigne. »

Anaïs Berneau et Sarah Martin à gauche, animant avec Thibaut Déplanche, les lectures de fosses pédologiques, le 11 juillet.

Frédérique Rose
(crédit photo : F. Rose)


(1) Un compte rendu détaillé de ces observations sera présenté dans le numéro 25 de Vitisbio d’octobre-décembre 2024 :

- Présentation de la méthode Speed, mise au point par Célesta-Lab, Décrypt’sol et Icosystème : méthode facile, accessible et rapide qui aide à poser le diagnostic physique d’un sol et dresser un plan d’action pour l’améliorer.

- Interprétation des fosses en fonction des modalités de couverture des inter-rangs

- Test du slip : à quoi sert-il vraiment ?

- Quelques préconisations sur les couverts végétaux en conditions séchantes