Nous voici arrivés à la fin de ce 6e journal de bord au Domaine de Roquenégade ! Pour ce dernier épisode, Alexis Gaudin et Émilie Gal partagent leurs vendanges des rouges. La météo, très sèche, leur fait revoir leurs pratiques.
Fermentations en route
Nous sommes le 12 septembre et la pluie tant espérée ne nous est pas parvenue. Les cuves ne déborderont pas cette année. Au moins, nous n’aurons pas de problème de stockage de bouteilles… En tout cas, il faut s'adapter à ce millésime compliqué. En cave, les premiers jus rentrés fermentent tout à fait correctement. La dynamique de fermentation n'est pas foudroyante mais en levures indigènes nous ne nous attendions pas à avoir des vinifications express. Chaque cuve de blanc ou de rosé, dont la température est maîtrisée entre 18 et 20°C, perd autour de 5 à 10 points par jour. Pour le premier rouge, celui à base de merlot, la progression est plus rapide avec une perte journalière de l'ordre de 15 points. Les jus gouttent bien, les analyses sont bonnes. Les premiers vins devraient être secs d'ici la fin de la semaine.
Manque de pluie
Côté vigne, c'est un peu plus compliqué. Le choix de rentrer les raisins ne se fait pas uniquement sur des décisions liées aux maturités mais aussi sur la capacité des vignes à tenir le coup. Les 10 mm que nous avons reçus fin août n'ont pas suffi à redémarrer les vignes et les températures élevées en journée comme de nuit ont entraîné des blocages de maturité sur certains cépages. Cette situation s'améliore ces jours-ci avec des températures redevenues dans la norme pour la saison.
Des pertes sur syrah
Au regard de ces conditions, nous avons dû rentrer notre parcelle de vieille syrah. Nous avons retardé la date de vendanges au maximum pour obtenir un profil qualitatif mais cela s'est fait au détriment d'une partie du volume. Les baies sur les zones de la parcelle les plus pauvres se sont desséchées. On estime avoir perdu 30% du volume. En revanche, ce que l'on a rentré est d'une grande qualité. La proportion de jus restant faible, la phase macération n'aura duré que 6 jours pour cette cuve. Le profil des jus de coule est bien équilibré. Quant aux presses, pour des raisons de capacité de pressoir, elles sont gérées avec les autres marcs qui ont été coulés le même jour.
Test de la macération carbonique
La vieille syrah n'est pas la seule parcelle qui a dû être traitée avec vigilance. Notre vigne de cabernet sauvignon a elle aussi lâché prise à la suite des quelques jours de canicule de fin août. Cependant ce cas est un peu plus compliqué à gérer. Habituellement, ce cabernet est vendangé la deuxième quinzaine de septembre et intègre l'assemblage de notre cuvée d'entrée de gamme rouge. Nous avons donc besoin de volume pour cette cuvée et attendre une meilleure maturité phénolique ne ferait que baisser ce critère. Sur les conseils de notre œnologue, nous avons donc décidé de le récolter le week-end dernier et de le traiter en macération carbonique pour développer des aromatiques qui colleraient bien au profil de notre entrée de gamme.
Une première
La macération carbonique est aussi une grande première pour nous. Nous avons placé la vendange grappe entière dans deux cuves béton de 40 hectolitres chacune. Les premières caisses rentrées ont été foulées pour laisser un fond de jus dans la cuve. Et nous avons rajouté 50 litres de syrah en fermentation pour que la saturation en CO2 se fasse. Les cuves ont été remplies au maximum et scellées. Maintenant, il faut attendre que la magie opère. Le décuvage devrait se faire semaine prochaine et pour l'instant les baies se dégustent très bien et commencent à changer de profil.
Bientôt la fin des vendanges
Aujourd'hui, il nous reste encore trois parcelles à vendanger, une syrah, un grenache et un carignan. Ces vignes ont nettement moins souffert que les précédentes et nous allons pouvoir les travailler « normalement » en recherchant le meilleur équilibre de maturité. La syrah et le grenache devraient être vendangés d'ici 3 à 5 jours. Il faudra attendre encore 5 à 10 jours de plus pour le carignan. La fin des vendanges 2023 devrait être actée autour du 25 septembre.
Alexis Gaudin et Émilie Gal
© A. Gaudin
Le partage d'Émilie et Alexis : adapter dans nos pratiques
Ces vendanges 2023 ne sont pas les plus simples à travailler. Manque de jus, carence en azote, déséquilibre des maturités, etc. Nous avons dû réfléchir aux produits finis que nous voulions proposer. Il est clair qu'avec ces conditions, nous ne pouvons pas obtenir les profils des cuvées 2021 ou 2022. Il nous a fallu remettre à plat notre réflexion et avec notre œnologue, trouver pour chaque vigne la solution pour en extraire le meilleur potentiel. Les pressurages, les macérations carboniques, les ajouts de moût aux macérations ont été les moyens mis en place pour y arriver sans rajouter 10 000 artifices car nous restons dans l'objectif du moins d'intrants possible.
Merci à Alexis Gaudin et Emilie Gal pour le partage de cette saison !
Direction vers un nouveau vignoble pour les prochains épisodes !