Le moment tant attendu par tous les vignerons et vigneronnes est arrivé au domaine de Roquenégade. Les vendanges sont lancées pour la production de rosé et de blanc, et de levain. Alexis Gaudin et Émilie Gal racontent cette première quinzaine de récolte.
Premières cagettes
Mardi 22 août, 6h00. Le tracteur démarre pour amener les premières cagettes à la parcelle de merlot. Nos 12 vendangeurs ont encore du mal à ouvrir les yeux. Mais on y est, les vendanges commencent. Le stress hydrique s'étant accentué ces derniers jours, les vignes les plus sensibles commencent à lâcher prise. Ça n'apporte rien de bon d'attendre davantage, donc c'est décidé, nous rentrons le merlot. En pressurage direct, il fera un très bon appoint à notre rosé.
Manque d'eau
La météo n'est toujours pas de notre côté pour cette troisième année. Par rapport à la sécheresse, la préfecture de l’Aude a passé notre secteur du niveau « alerte renforcée » à celui de « crise ». L'absence de pluies l’automne dernier se fait cruellement sentir. Même les frênes qui entourent nos parcelles sont tous desséchés. Côté vigne, nous espérons vraiment une pluie de 15 ou 20 mm pour redonner un coup de fouet et regonfler les raisins. La sortie est jolie et s'il y a un peu de jus, nous devrions avoir un meilleur rendement que les années précédentes. Tant que la dernière parcelle n'est pas rentrée, rien n'est joué.
Pressurage direct du merlot
Pour revenir au merlot, nous avons décidé de réaliser deux pressoirs soit environ 2 tonnes de vendange. Une partie du moût servira de base pour l'assemblage du rosé ou du vermeil. Le solde, environ 4 hectolitres, a été isolé pour servir de levain car cette année nous nous essayons aux levures indigènes. Nous avons donc traité séparément les deux derniers hectolitres de chaque presse. Ce volume a été placé sans stabulation à froid ni débourbage dans une cuve qui va être maintenue autour des 22-23°C. Le moût y est depuis 4 jours et la fermentation semble s'être correctement lancée. La densité chute de 5 à 8 points par jour. Nous enverrons dans les prochains jours un échantillon au labo pour analyser la population levurienne.
Rééquilibrage
Ce volume en pressurage direct a un autre avantage. Nous vinifions une partie du merlot en macération traditionnelle. Les baies étant de faible diamètre, la proportion de jus/solide n'est pas optimale. L'ajout du levain permettra de rééquilibrer cette cuvée. Par la même occasion, ça ramènera un peu de fraîcheur. L'opération est assez lourde à mettre en place pour toutes les parcelles en souffrance car il faut en vendanger préalablement une partie et réaliser des pressurages supplémentaires ce qui prend énormément de temps et monopolise beaucoup de cuves. Mais cela permet d'extraire plus en finesse et avec davantage de précision sur des cuvées difficiles.
Roussanne, en deux temps
Après le merlot, nous enchaînons avec les blancs (roussanne et grenache). La parcelle de roussanne est vendangée en deux fois. Avec la première partie se trouvant en bas de coteau sur des sols assez profonds, nous recherchons un profil frais avec de jolies acidités sans être pour autant en sous maturité. Nous venons de la rentrer ce 25 août avec un potentiel alcoolique de 13,5° et une acidité de 3,8 g/L ce qui est un équilibre plutôt satisfaisant pour notre région.
Blanc en macération
La deuxième portion de la roussanne, la partie haute de la parcelle, est vendangée 5 jours plus tard. Nous cherchons plus de structure sur ce volume. Cette année, nous changeons notre travail de vinification sur ce moût qui est habituellement un simple pressurage des baies. Nous avons d'abord réalisé une presse de 7 hectolitres que nous avons refroidis et laissés débourber pendant 24h. Ensuite nous avons rentré un volume à peu près équivalent directement en cuve après l'avoir éraflé. Nous allons donc vinifier un blanc de macération avec une importante proportion de jus. Cette année étant sèche, les équilibres sont assez compliqués. Avec ce procédé, nous pourrons travailler la macération sur une plus longue durée sans avoir une extraction trop brutale.
Grenache blanc, puis rouges pour rosés et vermeil
Entre les deux vendanges de roussanne, nous avons calé la récolte du grenache blanc qui est vinifié classiquement et en cette fin de mois d’août, nous enchaînons sur les rosés de syrah et mourvèdre. La syrah est notre base pour l'assemblage du vermeil qui est un entre-deux, une sorte de rosé structuré ou de rouge léger. Pour la vinifier, nous recherchons une légère macération de la vendange. Les syrahs sont ramassées avec une petite sur-maturité pour du rosé et toute la vendange est laissée pendant 24h en caissette avant pressurage. Cela permet d'extraire juste ce qu'il faut de couleur et de structure pour obtenir un profil plus complexe qu'un rosé. Le moût est ensuite vinifié comme le reste de nos rosés.
Après les blancs et les rosés, place au rouge, mais ça, on vous en parlera dans notre dernière newsletter.
Alexis Gaudin et Émilie Gal
© A. Gaudin
Le partage d'Émilie et Alexis : chariot de vendange, adopté !
Dans notre précédente newsletter, nous vous avions parlé d'essayer des traîneaux de vendange fabriqués maison. Avec ces premiers jours de vendanges, nous avons pu les tester in situ et le résultat est plutôt satisfaisant. Les vendangeurs ne passent pas de temps à aller chercher les bacs dans la rangée pour aller vider leur seau. La cagette est directement à leur pied. Celles-ci sont toujours remplies de la même façon, ce qui nous permet d'avoir un meilleur suivi des volumes rentrés. Et plus important, du côté vendangeur, ils apprécient ne plus avoir à porter leur seau et ont les mains plus libres pour travailler. Ils ont tous trouvé ce système plus pratique même s'ils préféreraient qu'il y ait un système de roulettes motorisé sous chaque chariot !