Le domaine de Cébène attache une grande importance à la maîtrise de la vigueur de la vigne, dans le respect de sa physiologie et de son équilibre : l’épointage est donc une technique clé. Et ce, dans un contexte où la sécheresse s’annonce…
SUITE DES TRAVAUX, AU QUOTIDIEN…
Actuellement, nous ne réalisons pas de travaux mécanisés dans les parcelles. Mais la débroussailleuse est en pleine action, sur les bords de vigne et dans les talus non mécanisables des terrasses des Bancèls. Nous continuons ces jours-ci quelques relevages là où c’est encore nécessaire. En raison des chaleurs annoncées, et craignant des risques de brûlure même avec des sous-dosages, nous avons reporté les traitements contre l’oïdium. Ceux contre le mildiou ne sont pas nécessaires dans la mesure où il n’y a pas de foyers primaires et un temps très sec.
Nous pratiquons avec parcimonie quelques épointages, à la main ou au bambou, selon les vignes. Et ce, pour garder un port de la végétation dressé, un éclairage tamisé des grappes et un microclimat favorable autour des ceps. Le captage de la lumière par les feuilles des rameaux verticaux non compactés dans un palissage nous semble essentiel pour accroître la qualité des raisins. En fin de journée, nous apportons quelques litres – le moins possible – aux jeunes oliviers, érables de Montpellier, caroubiers, figuiers, etc., plantés au printemps, pour qu’ils continuent de s’implanter. Ils viendront compléter les haies existantes, composées d’arbres et de buissons endémiques, qui se sont installés spontanément au fil des années. Le paillage autour des pieds vise à limiter l’évaporation due au soleil et au vent.
VERS UNE GRANDE SÉCHERESSE ?
Impossible de prévoir chaque année, la réserve hydrique qui sera disponible. Sous nos climats, les pluies ne sont jamais régulières, ni prévisibles selon les moments de l’année. De grosses pluies peuvent précéder de longues périodes de sécheresse, et ce, à différentes périodes selon les années. Néanmoins nous tentons d’anticiper en permanence, et de réajuster nos pratiques à chaque moment, au cas par cas. C’est un exercice délicat, car nous sommes souvent dans l’incertitude ! Tous nos sols sont sur schistes, sur le caillou, la roche-mère. La capacité d’infiltration de l’eau dans le sol est très variable selon les sols et la pendaison (l’inclinaison) des schistes, et selon leur compacité. Nous constatons que certains de nos sols récupèrent mieux ces eaux que d’autres, notamment les terrasses des Bancèls. Alors que dans une zone spécifique d’une de nos parcelles de grenache, les rameaux sont nettement plus courts.
Une alimentation hydrique beaucoup plus limitée entraînant une réduction de la surface foliaire : aubaine ou handicap ? Faut-il se réjouir de voir la croissance ralentie sur certaines parcelles de vieilles vignes sur des sols très peu profonds ? La « pompe à eau » est réduite grâce à une surface foliaire moindre. Si la sécheresse perdure, cette réduction de la surface foliaire dans ces zones à faible croissance, peut être une aubaine. Nous pensons aux pratiques inspirantes de certains vignerons de la Rioja qui ne font aucun apport azoté si l’hiver n’a pas été pluvieux, afin de limiter la masse foliaire et donc le volume de la « pompe à eau ».
Brigitte Chevalier
©B.Chevalier
LE PARTAGE DE BRIGITTE :
l’épointage des sarments dans les gobelets
Si les rameaux se développent fortement avant l’arrêt de croissance, le poids des sarments provoque à terme un basculement. Et ce, même pour les cépages à port érigé comme le grenache. Pour favoriser le passage des outils mécaniques dans les vignes en gobelet, il est difficile de ne pas intervenir. Certains vignerons pratiquent l’écimage (ou rognage). À Cébène, nous ne voulons pas appliquer cette pratique, lourde. Tout comme celle d’écimer 1 rang sur 4 en laissant pousser les sarments des autres rangs, qui couvriront ainsi le sol. Nous privilégions l’épointage, plus doux, afin de maintenir des rameaux droits sur nos gobelets. Nous jouons sur le réglage de la vigueur et l’équilibre physiologique de la vigne pour que l’arrêt de croissance intervienne avant que le rameau ne soit trop lourd et qu’il ne bascule à l’horizontale. Cette recherche de la maîtrise de vigueur n’est compatible qu’avec le renoncement aux forts rendements.